Les médias américains relaient la campagne européenne contre la peine de mort
Le ton a changé. Longtemps, les médias américains se sont contentés d'évoquer du bout des lèvres les pétitions de militants, les demandes de grâce présidentielle ou encore les visites d'hommes politiques européens. " Nous réagissions un peu en provinciaux, reconnaît Robert Burtman, pigiste pour l'hebdomadaire alternatif Houston Press. Les gens avaient tendance à ronchonner: "On va quand même pas se laisser donner des leçons de morale par les Européens"..."
Mais, pour la première fois depuis vingt ans, l'opinion vacille. Une majorité d'Américains se dit persuadée que des innocents ont été exécutés, et soutient la suspension des exécutions. Quel rôle ont joué les campagnes européennes dans cette évolution ? Un rôle certain, comme dirait l'autre, c'est à dire évident et... difficile à mesurer "Je crois que le Texas s'est senti un peu honteux, l'an dernier, lors du ramdam médiatique sur la peine de mort, analyse Jim Yardley, correspondant du New York Times à Houston (Texas). Pour la première fois, beaucoup de Texans sesont dit qu'il serait temps de réformer le système. Le Texan moyen a-t-il entendu parler de la mobilisation des Européens contre la peine de mort ? Probablement pas. Et s'il en avait entendu parler, il s'en foutrait."
On se passera des Texans pour le moment En attendant, ce sont les grands médias, du Today show de NBC (l'émission phare des matins américains) aux journaux du soir, qui soulignent le risque de pourrissement de l'image des États-Unis auprès de ses alliés. Certains donnent même la parole aux militants européens. time a ainsi offert une tribune à Robert Badinter, qui a mis crûment les États-Unis devant leurs responsabilités "Je de mande à mes amis américains : où est votre place dans le monde, vous qui espérez exercer un leadership non seulement technologique et militaire, mais aussi moral et culturel ? Parmi lesdémocraties qui ont aboli la peine de mort ? Ou avec.la Chine totalitaire et l'Iran fanatique ? " Aujourd'hui, les éditorialistes vont encore plus loin. Il serait peut être temps, affirment-ils, d'appliquer chez nous les leçons que nous donnons aux autres. Sinon, la position américaine sur la question des droits de l'homme sera systématiquement rejetée par nos alliés européens. C'est ce qu'a exprimé Felix Rohatyn, l'ancien ambassadeur des États-Unis en France, qui, à peine rentré à New York, a annoncé sa "conversion" dans la presse et son soutien à un moratoire. Autant de preuves que la mobilisation européenne n'est pas vaine.
Olivier Pascal-Moussellard
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